Disney
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Mettre en route un long-métrage d'animation avec des animaux n'est parfois
pas de tout repos. En effet, il s'agit bien souvent de retranscrire un
univers qui n'est ni familier aux réalisateurs, ni aux animateurs. Lumière
sur ces productions un peu spéciales !
1.
Des Modèles Plus Vrais que Nature
Quand l'animal se veut "toon", les animateurs peuvent prendre toute
sorte de libertés et laisser libre court à leur imagination. Mais quand
on recherche précisément la fidélité à la réalité, les compétences
exigées en terme de technique d'animation sont colossales, si bien
qu'un modèle visuel est plus que nécessaire. Le procédé est d'ailleurs
déjà bien courant pour l'animation de personnages humain: on filme
régulièrement en prises de vue réelles, avec des acteurs donc, des
séquences qui aideront les animateurs dans leur travail. On peut
difficilement envisager un tel processus avec des animaux, les coûts de
dressage seraient colossaux ! La seule solution est donc
l'observation, tout aussi efficace. |
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(Pour l'animation des hippopotames de
la séquence La Danse des Heures
de Fantasia, les artistes du studio ont pu s'inspirer des
mouvements de Jattie Noel, une femme particulièrement enrobée) |
(Des modèles vivants pour la
réalisation de Bambi) |
Revenons sur le cas de Bambi. Quatrième long-métrage
d'animation des studios Disney, le chef d'œuvre de 1942 arrive juste
après Dumbo et contraste fortement avec ce dernier. Il faut
dire que le parti pris visuel réservé à Dumbo conserve toutes
les caractéristiques d'un catoon. A l'inverse, Walt Disney veut faire
de Bambi son œuvre la plus représentative de la réalité. Hors
de question de voir dans Bambi des toons ! Des moyens colossaux et
assez étonnants sont mis en œuvre pour garantir la pérennité de ce
projet et parfaire au maximum l'animation. Des animateurs de talent
sont mis à contribution:
Ollie Johnston, Frank
Thomas, Milt Kahl, Marc Davis et Eric Larson entre autres. "Ils
savaient que ce ne serait pas facile. Ils savaient qu'ils ne savaient
pas ce qu'ils faisaient" raconte Don Hahn. Walt Disney
décide même d'amener aux studios de vrais animaux en chair et en os
qui pourront directement servir de modèles vivants aux animateurs:
moufettes, lapins et cerfs se baladaient dans les locaux comme des
animaux de compagnie. La contribution de grands spécialistes a été
nécessaire: les studios ont fait venir les meilleurs professeurs de
l'Institut Chouinard, ainsi que Rico Lebrun, un grand artiste
spécialisé dans l'anatomie. Avec ces cours d'anatomie et des modèles
vivants, les animateurs avaient toutes les clés en main pour réussir à restituer toute la noblesse de la vie sauvage. |
Le même procédé a été utilisé lors de la production de La Belle et le
Clochard. Les artistes du studio ont énormément étudié les chiens afin
de reproduire leurs mouvements à la perfection. En effet, lorsque les
stars du long-métrage sont des animaux, il est impératif de considérer
toutes les manies de nos amis à quatre pattes. Et chaque détail
compte: comment marchent-ils ? Quelle patte poser avant l'autre ?
Comment bougent leurs les épaules ? Sur quelle patte repose leur poids
? Si ces questions peuvent paraître accessoires, elles sont pourtant à
l'origine de la qualité remarquable de l'animation du chef d'œuvre de
1955. |
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(Photo de production de La Belle et
le Clochard en présence des modèles des stars du film) |
(Photo de production de Les 101
Dalmatiens, avec les doublures en chair et en os de Pongo et Perdita) |
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Et les animaux ont continué à envahir les studios tant que possible.
Bien sûr, certains films se prêtent mieux à l'exercice. Les chiens
sont bien entendu les grandes stars des animateurs, et avec la mise en
chantier de Les 101 Dalmatiens, ces derniers vont succomber au
charme des taches ! Mais les réalisateurs ne vont pas s'arrêter aux
banals chiens et chats pour préciser l'art de leurs animateurs. Pour
la production de Rox et Rouky, c'est un superbe renardeau roux
qu'adopta Wolfgang Reitherman, et il devint bien vite la mascotte des
artistes. Il faut dire que ce jeune canidé, nommé Rox (tiens donc !),
aimait particulièrement se balader d'animateur en animateur, heureux
des caresses et friandises récoltées à chaque passage. |
Des chiens, des chats, des renards ou autres lapins... on reste tout
de même raisonnable... jusqu'au jour fatidique où les studios Disney
décident de mettre en chantier leur nouveau film d'animation, Le Roi
Lion. Et les réalisateurs du film, Roger
Allers et Rob Minkoff, n'hésitent pas à ramener dans les locaux de
Walt Disney Feature Animation des lions en chair et en os. A l'image
de Rox une dizaine d'année auparavant, des lionceaux se baladent
librement d'animateur en animateur, qui en profitent pour capturer
chacun de leurs mouvements. Et les adultes sont aussi de la partie :
un énorme lion de 350 kilos nommé Poncho a rejoint l'équipe du film !
On pourra considérer que depuis ce jour, aucun invité aussi marquant
que le roi des animaux n'aura remis les pattes dans un studio
d'animation ! |
(L'équipe de Le Roi Lion, avec
son invité de marque) |
(Glen Keane, superviseur de l'animation
de Marahute) |
Parlons
maintenant d'un cas assez particulier: si vous n'avez pas l'animal
vivant sous la main, prenez sa version empaillée ! Certes, c'est un
peu moins drôle, mais le modèle d'aigle royal prêté par un musée
d'histoires naturelles à Glen Keane a été très utile pour l'animation
de Marahute. "J'ai beaucoup étudié la façon dont bougent les animaux,
mais dans ce cas précis j'ignorais tout des oiseaux. J'ai du étudier
leur structure osseuse. Il fallait que je la connaisse comme ma propre
structure corporelle" raconte Glen Keane, chef animateur du personnage
de Bernard et Bianca au Pays des Kangourous. |
2. Les
Voyages d'Etude
Avant d'emmener directement des animaux aux studios et très tôt lors
de la mise en chantier du film, il est courant de voir l'équipe du
long-métrage s'embarquer dans des voyages d'études, parfois jusqu'au bout du
monde, afin d'approcher les futures stars de leur film dans leurs
conditions naturelles de vie. Pour Bambi par exemple, Walt Disney
avait envoyé une équipe de photographes dans une forêt du Maine. Ils
rapportèrent des centaines de photos, mais finalement les détails
représentés ne furent pas retranscrits dans le film.
D'autres
expéditions ont été au contraire primordiales: celle pour la mise en
chantier du Roi Lion est un exemple évident. En novembre 1991
et pendant plus de deux semaines, l'équipe du film s'est rendue en
Afrique Centrale pour un safari hors du commun, afin de rencontrer en
chair et en os, dans leur milieu naturel, les vedettes du film.
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(Travaux de recherche pour
Tarzan et Frère des Ours) |
Pour mieux comprendre la vie des gorilles dans leur milieu naturel,
l'équipe de Tarzan s'est rendue en Afrique , notamment en
Ouganda où se trouvait une famille de 13 gorilles au dos argenté. Glen
Keane se souvient: "J'ai été surpris. Je croyais trouver des gorilles
méchants et monstrueux. Mais en arrivant, on a vu une famille de 13
gorilles qui étaient assis en train de se détendre, comme une vraie
famille".
Pour Frère des Ours, de nombreux clichés d'ours et d'élans ont
été pris durant les expéditions des réalisateurs dans les états du
nord.
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Mais il n'est pas
toujours nécessaire de partir aussi loin. Reprenons l'exemple de
Bernard et Bianca au Pays des Kangourous. Les animateurs ont pu
visiter le zoo de San Diego en Californie afin de découvrir "en live"
les héros qu'ils devront restituer sur le papier. Kangourou, koala,
émeu, serpent coloré et même l'oiseau rieur Kukaburra ont été de
précieuses aides pour l'équipe. "Il est nécessaire d'observer la
réalité car c'est de là que découlera notre créativité. Il est
difficile de travailler sans aucun modèle de référence, nous
observerons donc les kangourous, les koalas, les ornithorynques, et
tous les animaux qui peuvent aider l'animateur à franchir ce petit pas
vers la réalité" raconte Hendel Butoy, le réalisateur. |
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(L'équipe de Bernard et Bianca au
Pays des Kangourous autour de l'une des stars du film) |
3. La
technologie au service de l'animation
(La débandade du Roi Lion) |
L'un des défis majeurs a relever lorsque l'on anime un animal est,
nous l'avons souligné, la fidélité. Dans certains cas, les animateurs
sont aidés dans leur travail par quelques outils qui, il faut
l'avouer, leur simplifient la vie. Le premier, et pas des moindres,
est bien entendu l'outil informatique. Apparu pour la première fois
dans Taram et le Chaudron Magique, ses performances sont très
vite étendues à diverses applications. Un premier exemple est la
spectaculaire débandade des gnous dans Le Roi Lion. Il a fallu
travailler deux années entières pour réaliser en images de synthèse la
scène de la fuite de ces centaines d'animaux qui ne dure que... 2
minutes et 30 secondes à l'écran ! Une séquence légèrement similaire
introduit le personnage de Kinaï dans Frère des Ours, mais il
s'agit cette fois de caribous.
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Mais des années auparavant, les studios avaient eu un autre défi de
taille à relever: animer pas moins de 101 Dalmatiens et tout ça sans
ordinateurs ! Pour réussir ce travail, un département uniquement
destiné aux taches des dalmatiens a été ouvert. Il faut dire qu'avec
les 32 taches de chaque chiots, les 76 taches de Pongo et les 69
taches de Perdita, il y avait du travail ! Chuck Jones a dit:
"Seulement Disney peut faire un film appelé Les 101 Dalmatiens avec
six millions de taches". Pour beaucoup, c'était de la folie
totale. Heureusement, une nouvelle technique d'animation a été d'une
aide fabuleuse et a permis de porter Les 101 Dalmatiens sur les
écrans: la Xérographie. A la fin des années 50, les studios
Disney vivaient une période difficile à cause du gouffre financier
qu'avait été La Belle au Bois Dormant, dont le coût de production a
été colossal pour l'époque et les recettes très décevantes. Il fallait
donc réduire les frais pour le prochain film. Ub Iwerks, collaborateur
de Walt Disney depuis ses débuts, inventa alors la Xérographie, en
s'appuyant sur le développement des photocopieuses noir et blanc à
l'époque. Ce système permettait alors de transférer directement une
image sur pellicule, plutôt que sur papier. Ainsi, exit le département
d'encrage, aux coût prohibitifs. La Xérographie était donc un procédé
parfait pour les chiens noirs et blancs, il fallait juste faire un
joli contour et les dessins des animateurs arrivaient directement sur
les cellos ! |
(C'est en partie grâce au processus de
Xérographie que Les 101 Dalmatiens pu voir le jour) |
Lire le Chapitre 4
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