Et bien… et bien… En 2014 Maléfique sortait dans les salles obscures et redessinait complètement l’intrigue et les personnages de La Belle au Bois Dormant, dont la célèbre sorcière aux cornes devenues cultes. Deuxième film à lancer l’ère des remakes des classiques Disney après Alice au Pays des Merveilles, Maléfique rencontra un franc succès au Box-Office mondial avec près de 750 millions de dollars de recettes. Cette relecture complète méritait d’ailleurs l’intention en faisant de la célèbre méchante une héroïne incomprise finalement douée de rédemption. Malgré le succès financier, personne n’attendait qu’une suite soit mise en chantier, surtout après l’échec cuisant d’Alice de l’Autre Côté du Miroir. C’est avec surprise et intérêt que Maléfique : Le Pouvoir du Mal fut donc accueilli, parmi le florilège d’adaptations de 2019 et les prises de risque minimales d’Aladdin et Le Roi Lion.

 

 

Maléfique : Le Pouvoir du Mal bénéficie d’un atout indéniable en faisant suite à l’une des adaptations "live-action" les plus originales de ces dernières années. Ainsi, son postulat demeure totalement inédit et la surprise pour le spectateur est intégrale pendant les deux heures de visionnage. Et cela fait un bien fou d’avoir enfin un brin de nouveauté dans la relecture d’un classique Disney ! Disposant d’une page totalement blanche, Linda Woolverton de retour au scénario propose un récit plus haletant et complexe que celui du premier film. Cinq ans après que Maléfique ait délivré Aurore de son cruel sortilège et fait de cette dernière la reine de la Lande, le Prince Philippe se décide à demander la belle en mariage. Cette annonce fait renaitre l’espoir d’un monde où les royaumes de la Lande et des Hommes cohabiteraient enfin dans la joie et l’harmonie alors que Maléfique est encore crainte de tous. C’est sous tension que l’impulsive fée rencontre les parents de Philippe lors d’un diner dont l’issue tragique ébranlera sa relation d’amour sincère avec la princesse qu’elle a élevé.

 

 

L’univers Fantasy amorcé dans le premier opus prend ici toute son ampleur et s’étoffe au-delà des frontières de la Lande, prémisses d’une probable saga en construction. Le spectateur est transporté dans un monde à la fois féérique peuplé de créatures magiques, mais aussi lugubre et austère où la guerre fait rage. L’œuvre prend alors une dimension épique majeure et inattendue pour un film du label Disney. S’il reste assez linéaire et souffre d’une baisse de régime en second acte, le récit parvient à capter l’attention du spectateur dans ce prolongement de La Belle au Bois Dormant à la sauce Game of Thrones. Le troisième acte est alors bonifié par une bataille finale époustouflante, digne des plus grands films d’heroic fantasy. Devant ce fort potentiel, le spectateur en redemande mais reste sur sa faim, le script méritant un brin d’audace supplémentaire pour un résultat espéré moins inoffensif. Les références récurrentes au long métrage d’animation sont toujours légions et distillées avec parcimonie.

 

 

Comme le premier opus, Angelina Jolie embrasse le rôle de Maléfique qui semble définitivement écrit pour elle. Magnétique, l’actrice étoffe un peu plus l’aura de cette héroïne impulsive, incomprise et isolée dont on explore un peu plus les origines. Œuvre résolument féministe, elle partage l’écran avec une autre icone du cinéma : la parfaite Michelle Pfeiffer. L’actrice brille en interprétant la cruelle reine Ingrith, froide et impassible. Un duo d’antagonistes charismatique, qui éclipse malheureusement une Elle Fanning toujours fade dans le rôle d’Aurore. Il est de même pour Harris Dickinson qui ne fait pas mieux que son prédécesseur. Le jeune acteur ne parvient pas à donner une aura héroïque à un Prince Philippe anecdotique malgré quelques tentatives avenantes en troisième acte. Reste Sam Riley pour sauver le casting masculin dans le rôle de Diaval, le fidèle acolyte de Maléfique dont les interventions sont toujours appréciées.

 

 

Maléfique : Le Pouvoir du Mal est une réussite visuelle. Les effets spéciaux (nombreux) sont d’excellente facture et plongent le spectateur dans un univers fantastique crédible. Malgré cette débauche d’effets visuels, un soin tout particulier a été apporté à la photographie avec des tableaux d’une beauté inspirée, notamment le pays des fées noires ou le palais et donjon de la Reine Ingrith. Le réalisateur Joachim Rønning, fort de son expérience sur Pirates des Caraïbes : La Vengeance de Salazar, joue avec la caméra dans des plans particulièrement vertigineux. Enfin, notons une partition musicale de Geoff Zanelli manquant souvent de relief, alors que les scènes grandioses méritaient bien mieux. Demeurent les quelques notes oniriques héritées du premier opus pour relever la bande son décevante.

 

Plus abouti et épique que le premier opus, Maléfique : Le Pouvoir du Mal étoffe un peu plus le mythe autour de la célèbre fée. Bousculant les codes propices aux contes de fées, la franchise s’élance audacieusement vers un univers fantasy encore un brin inoffensif. Restent les prestations magnétiques d’Angelina Jolie et Michelle Pfeiffer, le scénario inédit et la photographie d’exception pour faire de cette suite la bonne surprise de cette rentrée.