C'est le cycle de la vie : 25 ans après le triomphe commercial et critique de Le Roi Lion, qui a clôturé le second Âge d'Or des Walt Disney Animation Studios, le film culte revient au cinéma dans une nouvelle version photoréaliste. Une nouvelle fourrure en quelque sorte, qui s'inscrit dans le contexte actuel florissant et lucratif des remakes "live action" des plus grands classiques du prestigieux studio. Porté par l'attente inégalée et légitime de toute une génération, le remake n'avait pas le droit de décevoir. Face à une telle pression, l'amour pouvait-il réellement briller sous les étoiles ?

 

 

Quel exercice délicat de devoir réimaginer une histoire connue du monde entier depuis deux décennies ! Les Studios Disney ont usé de deux processus différents pour la relecture en prises de vues réelles de leurs titres phares : le risque via la revisite totale (Alice au Pays des Merveilles, Maléfique, Dumbo), ou la valeur-sûre d'une transposition fidèle du long-métrage d'origine (La Belle et la Bête, Aladdin). Pour Le Roi Lion, le blasphème d'importantes modifications scénaristiques n'a pas été considéré, qui blâmer pour cela ? Mais là où La Belle et la Bête et Aladdin s'éloignaient subtilement (et avec réussite) de leur source d'origine pour étendre le récit et l'adapter à la complexité d'un film réaliste, les scénaristes du Roi Lion ont décidé de coller exactement au script de 1994 et de ne prendre que peu, si ce n'est aucune liberté. Une considération autrement dommageable que les rares ajouts, qui doivent représenter moins de 10% du nouveau film, alourdissent inutilement le rythme parfait du volet d'origine. Quelques scènes se retrouvent ainsi artificiellement allongées, tandis que les rares séquences inédites n'apportent rien de concret à l'histoire. Le spectateur se retrouve donc face à un récit qu'il connaît déjà par coeur, sans aucun effet de surprise.

 

 

Face à cette absence de réécriture scénaristique, il ne reste au spectateur aguerri que l'appréciation d'un visuel. Le rendu photoréalise de ce nouveau Roi Lion est, il est vrai, absolument impressionnant. De nombreux progrès sur les allures, les textures, la musculature ont encore été réalisés depuis Le Livre de la Jungle, qui était déjà une prouesse technique. Se dire que tout a été créé par ordinateur, décors compris, frôle le prodige. Pas étonnant que le projet ait été confié à Jon Favreau, plébiscité à juste titre après le succès du remake mélangeant live-action et animation réaliste. Pour encore mieux apprécier la technique, la plupart des scènes de l'oeuvre d'origine sont reproduites plan par plan. La démarche fonctionne parfaitement pendant les premières minutes du film, où l'on ne peut être que subjugué par la beauté des images et la rigueur de technicité dont il a fallu faire preuve. L'animation de la parole est en outre globalement réussie et s'intègre aux images avec fluidité, même si on préfèrera les séquences muettes, plus naturelles. Mais sans effort de relecture, Le Roi Lion se transforme en un exercice de style de deux heures. Une coquille vide diront les plus sévères, d'autant plus que les émotions peinent à passer sur des animaux photoréalistes, là où le spectateur vibrait avec le Simba animé traditionnellement il y a 25 ans.

 

 

Difficile également pour le nouveau casting français de faire oublier des voix entrées dans l'insconcient collectif depuis 25 ans. Si Jamel Debbouze (Timon), Alban Ivanov (Pumbaa), Sabrina Ouazani (Shenzi) et Michel Lerousseau (Scar) s'en sortent honorablement tant sur les dialogues que le chant, le choix de Rayane Bensetti est clairement questionnable tant il manque de prestance dans le rôle de Simba, et surtout incapable d'assurer lui-même la partie chantée. Un problème que n'a pas connu Anne Sila (Nala), mais malheureusement la voix douce et cristalline de la chanteuse s'éloigne artistiquement de la puissante Beyoncé. Quant à Jean Reno qui reprend son rôle de Mufasa, la flamboyance n'est plus la même.

 

 

Peu de renouvellement a été réalisé sur la somptueuse partition originale d'Hans Zimmer, que l'on retrouve avec un plaisir certain. Toujours les mêmes frissons aux premières notes de "Le Cycle de la Vie", la même énergie devant "Je Voudrais Déjà Être Roi" et la même émotion sur "L'Amour Brille sous les Etoiles". "Soyez Prêtes" bénéficie d'une réorchestration très réussie tandis qu'"Hakuna Matata" s'offre quelques improvisations bienvenues. "Le Lion est Mort ce Soir" se voit royalement allongée. Comme pour Aladdin , une seule chanson inédite a été intégrée au film, "Spirit", interprétée par Beyoncé en version originale. Alors que la nouvelle chanson de Jasmine permettait le développement du personnage, "Spirit" sonne faux et n'apporte aucune émotion ou élément nouveau dans l'histoire, et pire encore remplace l'un des moments musicaux les plus poignants de l'opus original.

 

Passé l'effet de surprise d'une technologie ahurissante de réalisme et la curiosité de voir des scènes cultes recrées dans un réel digital, Le Roi Lion peine à retrouver l'émotion et la chaleur de l'opus original. Les studios Disney ont-ils eu peur de dérouter les fans du classique de 1994 pour prendre si peu d'initiatives scénaristiques ? Une émotion reste cependant intacte, celle de la nostalgie d'avoir grandi avec une si belle histoire, et d'avoir chanté de si belles musiques. Hakuna Matata !

 

  

Il y a une semaine avait lieu à Paris la grande avant-première du Roi Lion. Le casting français a fait le déplacement pour nous parler de leur expérience du doublge du film. Etaient présents Rayane Bensetti (Simba), Anne Sila (Nala) et Jamel Debbouze (Timon).

 

 

Presse : Quel souvenir gardez-vous de votre premier visionnage du Roi Lion version animée sorti il y a 25 ans ?

Anne Sila : J’ai dû voir ce film un millier de fois. C’est une histoire qui touche tout le monde.

Jamel Debbouze : J’ai tout fait pour voir ce film quand il est sorti, je m’en souviens très bien. Je me rappelle avoir resquillé pour voir le Roi Lion dont la sortie était un événement. Je me souviens être passé par toutes les émotions : la joie, la peine, c’est un film incroyable !

Rayane Bensetti : C’est le premier film que j’ai vu et qui reste mon préféré. Il m’accompagne depuis l’enfance. Etre Simba est un rêve qui se réalise.

 

Presse : Anne, il s’agit de votre premier doublage. Ce personnage de Nala est très fort, royal et courageux.

Anne Sila : Quand on m’en a parlé j’ai cru à une blague. Je n’arrive toujours pas à y croire.

 

Presse : Par contre Jamel vous êtes rodé à l’exercice du doublage. Vous êtes l’un des membres d’un duo mythique, Timon et Pumbaa. Avez-vous pu enregistrer avec Alban Ibanov ?

Jamel Debbouze : Pas tout évidement car Alban est très dissipé et il fallait un minimum de concentration (rires) ! J’ai dû le rappeler à l’ordre une fois ou deux ! Je le connais depuis tout petit, on s’aime tellement et on a tellement rit ensemble.

 

 

Presse : Vous chantez aussi !

Jamel Debbouze : Je voulais absolument être dans cette distribution. Je fais des doublages pour Disney depuis Dinosaure en 1999, c’est une maison que je connais très bien, une famille presque. Mais je ne voulais pas passer à côté de ce monument qu’est Le Roi Lion. J’ai littéralement soulé l’équipe qui n’était pas vraiment emballée au début car il fallait chanter. Alors j’ai pris des cours de chant, j’ai passé des heures à me faire humilier par une prof. J’avais vraiment envie de le faire et je me suis donné à fond.

 

Presse : Doit-on absolument coller au texte ou peut-on s’autoriser d’improviser ?

Rayane Bensetti : Pas vraiment ! Il faut bien respecter ce qu’ont fait les américains, jusqu’aux intonations. Ça m’a pris un peu de temps avant de trouver ma voix. C’est arrivé à la fin du film que j’ai été réellement satisfait et j’ai demandé à tout recommencer depuis le début ! J’ai essayé d’être le plus professionnel, le plus carré possible. Je sais qu’il y a une réelle attente et que le public a envie de voir du Simba et pas du Rayane Bensetti.

Jamel Debbouze : Moi j’ai ajouté une phrase en arabe à vous de la trouver (rires). C’est la première fois de ma vie que je respecte à 100% un personnage. J’ai toujours tendance à improviser mais cette fois on a été intransigeants car on s’attaque à un classique.

 

 

Presse : Quelles caractéristiques techniques vous ont le plus bluffé quand vous avez découvert cette nouvelle version du Roi Lion ?

Jamel Debbouze : Le rendu visuel est incroyable. On est passé à un autre niveau. Tout est travaillé à la perfection, des animaux aux décors. On voit des animaux parler, vivre, ce mouvoir. C’est une expérience visuelle unique. On est d’ailleurs un peu perdus tant tout paraît si réel. Le plus dur est d’avoir réussi à donner de l’âme à ces personnages. Les yeux sont un élément fort, le pelage est fou !

 

Presse : Anne, vous avez été touchée par les thématiques : la relation parent/enfant, la loyauté, la trahison… Est-ce important de continuer à véhiculer de telles thématiques ?

Anne Sila : On a jamais autant vécu d’émotions contrastées que maintenant. Quand j’ai vu le film j’ai vraiment été marquée par ses émotions cachées.

 

Presse : Avez-vous peur ou l’espoir que ce nouveau film devienne un classique et remplace le précédent ?

Jamel Debbouze : Chacun a sa place. L’histoire est tellement universelle, les dialogues et le scénario sont tellement forts que çà dépasse les générations. Ce sont des expériences visuelles très différentes.

Anne Sila : On nous offre une madeleine de Proust sur un plateau ! Il n’était pas question d’améliorer l’existant mais juste pour le simple plaisir de le revivre différemment.

 

Presse : 25 ans après, ce film n’est-il pas plus stressant pour les jeunes enfants ?

Jamel Debbouze : La peur est un élément important pour raconter une bonne histoire et pour le développement des enfants. Il ne s’agit pas de les stresser mais leur raconter la vraie vie en les faisant un peu rêver !

 

 

Presse : Ce film n’est-il pas un peu militant pour les espèces menacées que l’on y voit ?

Rayane Bensetti : Il ne reste plus que 20 000 lions sur la planète, soit 50% de moins qu’il y a 25 ans quand le dessin animé est sorti au cinéma. Une grande campagne nationale a été lancée avec le soutien financier de Disney, « Protect the Pride », pour la sauvegarde des lions et des autres espèces.

 

Presse : Un souvenir qui va vous rester de cette expérience ?

Anne Sila : Claire Guyot m’a beaucoup coaché et je l’admire beaucoup.

Rayane Bensetti : Quand j’ai reçu la réponse par SMS : « c’est toi Simba ».

Jamel Debbouze : Le jour où ils m’ont payé (rires) !! N’écrivez pas ça c’est des conneries ! J’ai adoré chanter, j’ai joué dans un classique incroyable avec mon ami d’enfance. C’est à ce moment-là que je me suis dit « j’adore ma vie ».